Interview de Patrick Chauvel

Patrick Chauvel est reporter de Guerre. Il a été plusieurs fois blessé. Ses images ont fait la Une de Match, Time, Newsweek. Son travail a été honoré par le prestigieux World Press. Au mois de juin dernier, il a publié « Rapporteur de Guerre », dans lequel il raconte 35 ans passés à vivre et témoigner de la Guerre. Rencontre avec un homme vrai qui a des choses à dire.

Le Magazine.info : D’où est venue cette envie de publier un livre racontant ainsi 35 années à photographier la Guerre, alors que vous étiez déjà reconnu pour votre travail de photographe et de réalisateur ?

Patrick Chauvel : Il m’arrivait parfois de raconter à des amis quelques épisodes de mes voyages. Florent Massot, le co-directeur de Oh Edition !, a eu vent de mes histoires. Nous sommes devenus amis et il m’a finalement proposé d’écrire un livre. Je dois dire que j’étais assez réticent au début, car mon métier, c’est avant tout de voir, et non pas d’être vu. Je ne voyais pas pourquoi je devais me raconter.

Finalement, à force de persuasion, Florent m’a convaincu que ce livre compléterait d’une belle façon mon travail de reporter de guerre. Je dois dire que livre a vraiment vu le jour grâce à Florent, qui s’est révélé être un éditeur particulièrement convaincant. La rédaction du livre a toutefois pris du temps, vu que je partais près de 300 jours par an. Finalement, après que la remise du manuscrit a pris deux ans de retard, Florent m’a pratiquement confisqué mon passeport, histoire de m’obliger à finir mon livre. Du coup, je l’ai presque entièrement écrit en 6 mois, même si notre première discussion sur le sujet remonte déjà à plus de 6 ans. « Rapporteur de Guerre » est finalement sorti le 1er juin dernier.

Le Magazine.info : Quel bilan faites-vous aujourd’hui de cette parution ? Comment le livre a-t-il été reçu par le grand public ?

Patrick Chauvel : Je dois dire que le retour que j’en ai eu est particulièrement positif. Florent avait raison. Beaucoup de jeunes m’écrivent pour me demander comment parvenir à faire ce métier. C’est bien. Il faut une relève. Surtout dans un métier comme le nôtre. Si des livres comme « Rapporteur de Guerre » aident ces jeunes à comprendre le sens de notre travail, alors tant mieux. Nous n’avons qu’une seule richesse dans notre métier : notre crédibilité. Il faut s’accrocher à cela ! Le but de ce livre était de raconter ce qui se passe avant, pendant, et après une photo. Il ne faut pas que l’on puisse croire qu’il est si simple que cela de faire une photo. Lorsque l’on regarde une photo dans un journal, il ne faut pas oublier qu’il y a toujours derrière cette photo des hommes avec une histoire. C’était véritablement ça mon propos : montrer les coulisses du métier de photographe de guerre.

J’avoue que les ventes ont largement dépassé les chiffres prévus. La presse en a beaucoup parlé et nous avons reçu beaucoup de lettres. Bien souvent, les gens m’écrivent pour me dire qu’après avoir lu le livre, ils ne regarderont plus les journaux de la même façon. C’est très positif, puisque je voulais avant tout dire à mes lecteurs : « faites-nous confiance ! Nous n’allons pas risquer de nous faire trouer la peau, ou marcher pendant des mois sous la neige en Tchétchénie, simplement pour raconter des conneries ». Il faut faire confiance aux journalistes de terrain. Il me paraissait important de remettre les choses au point, de dire que notre métier était fait par des gens sérieux qui ne travaillent pas pour du vent, et qui ont un réel sens de l’éthique.

Le Magazine.info : Précisément, n’avez-vous pas parfois le sentiment que l’abondance d’images et l’exposition constante de la guerre dans les médias, notamment à la télévision, peut risquer de favoriser sa banalisation, et finalement, son acceptation passive ou résignée par le public ?

Patrick Chauvel : S’il y a bien une chose dont je suis persuadé, c’est que si nous ne faisions pas de reportages, alors là, pour le coup, c’est certain que cela ne servirait à rien. Il arrive effectivement qu’un reportage passe inaperçu. Cela ne change cependant rien au fait qu’il sera toujours utile, au moins un peu. A force d’aller 20 vingt fois de suite en Israël ou en Tchétchénie, j’ai appris à connaître les combattants et les civils. Dès que ça pète quelque part, immédiatement, des noms et des visages me reviennent en tête. Et là, je peux vous dire que je sens tous ces gens orphelins de journalistes. Tous ces gens ont besoin d’un témoin qui assiste à leur drame. Ils réclament de pouvoir de sentir moins seuls.

C’est vrai qu’il existe un risque à submerger le public d’images. Mais au final, il y aura toujours une image qui ressortira parmi les autres. Et puis, de toute façon, ce n’est pas possible de faire comme s’il ne se passait rien. Il ne faut pas non plus dénigrer le public. Il est bien plus intelligent qu’il en a l’air, et je ne pense pas, quoi qu’il arrive, qu’il fasse l’amalgame entre la presse people, par exemple, et le drame palestinien ou Tchétchène.

Le Magazine.info : Votre livre s’ouvre sur le récit de la prise de Panama par les Américains en 1989, avant de reprendre un déroulement chronologique, depuis vos débuts en Israël en 1967, pendant la guerre des 6 jours, jusqu’au premier conflit tchétchène en 1994. Pouvez-vous expliquer ce choix de narration ?

Patrick Chauvel : J’ai reçu deux balles dans le ventre à Panama. Je suis resté 4 heures sur le trottoir à attendre les secours. Ce n’était pas la première blessure que je recevais, mais là, j’étais certain qu’il n’y avait plus d’espoir. Je connais ce genre de blessures. J’ai souvent aidé les infirmiers de combat à accompagner vers la mort des types qui avaient ce genre de blessures. Il était évident qu’il ne servait plus à rien de les soigner. J’ai donc réellement cru que c’était cuit. Pour la première fois, je me suis vraiment demandé : « Pourquoi avoir fait tout ça ? Qu’est-ce qui a fait que je me retrouve là, en train de mourir, dans une rue de Panama ? ». Et puis finalement, je ne suis pas mort. En revanche, j’ai pu m’interroger sur le sens véritable de mon travail. J’ai alors pensé qu’il était peut-être bien de commencer mon livre en racontant cet épisode. La rédaction du livre est malgré tout restée très instinctive. Il n’y avait aucun plan prédéfini. J’ai seulement veillé à ne parler que des faits qui me revenaient le plus naturellement en mémoire. Il y a bien une vingtaine de conflits dont le livre ne parle pas. Les guerres Afghanes et les conflits en Amérique latine, par exemple, sont tellement à part qu’il aurait fallu consacrer des livres entiers rien qu’à leur sujet.
Dans le livre, vous racontez des moments qui semblent vous avoir profondément marqué. Je pense notamment à un épisode de la guerre au Vietnam, lorsque tout jeune, vous êtes confronté à l’exécution sommaire d’un jeune soldat vietminh par les GI américains. Face à votre sentiment de révolte, l’officier américain vous a alors demandé de vous contenter de faire votre métier et de le laisser mener sa guerre. Quel regard portez-vous aujourd’hui sur cet événement ?

J’ai découvert « l’autre » à ce moment-là, « l’ennemi ». Paradoxalement, dans les conflits, la notion d’ennemi reste relativement abstraite. On voit rarement l’ennemi. Notamment parce qu’en général, si on le voit, cela veut surtout dire qu’on est sur le point de se faire tuer. On voit des morts, des blessés, des prisonniers, mais on voit très peu l’ennemi combattre.

Au Vietnam en particulier, il était impossible de s’éloigner de la patrouille avec qui l’on était. Par conséquent, je patrouillais inlassablement avec les soldats américains, couvert des mêmes uniformes qu’eux, comme l’imposait le règlement. A l’époque, j’avais 18 ans, comme les soldats américains. Nous étions devenus très amis. Ni eux, ni moi ne réalisions vraiment ce que nous faisions là. Et tout à coup, ce jeune soldat vietnamien, fait prisonnier après une embuscade meurtrière et sur le point d’être tué à son tour, s’est mis à me parler, et à devenir enfin pour moi une personne réelle, faite de chairs et d’os. J’ai subitement été renvoyé à la place qui était la mienne : celle du journaliste qui ne doit pas prendre parti. D’un seul coup, je suis devenu journaliste, presque malgré moi. Je dois dire que mon apprentissage a été assez violent. En un instant, j’ai été forcé de me muer en journaliste et de ne plus être simplement un jeune homme en quête d’aventure.

A ce sujet, je voudrais dire que le choix du titre du livre - « Rapporteur de Guerre » - n’est pas le fruit du hasard. Aujourd’hui, lorsque je ferme les yeux, je vois ce type, mais j’en vois aussi des centaines d’autres. Partout où je vais, je « rapporte » la guerre avec moi, je la trimballe partout. Lorsque je regarde des buissons, par exemple, je ne peux pas m’empêcher de me dire qu’ils pourraient faire un bon emplacement pour une embuscade. Lorsque j’entends un hélicoptère au-dessus de Paris, j’ai la chair de poule...

Le Magazine.info : Revenir dans un pays en paix ne vous apporte pas de réconfort ?

Patrick Chauvel : Je profite largement de la paix, peut-être même mieux que ceux qui n’ont jamais connu autre chose que ça, puisque je sais que la paix n’est peut-être jamais acquise. Mais c’est vrai que la guerre n’est pas loin. Un son, une odeur, suffit à me rappeler la guerre. Par exemple, l’odeur du barbecue me fait surtout penser à un char qui crame. J’avoue que cela ne me donne pas vraiment faim. 

Le Magazine.info : Vous faites plusieurs fois allusion à vos retours à Paris dans le livre, et à chaque fois, vous en parlez comme un moment pénible.

Patrick Chauvel : C’est vrai que lorsque j’étais plus jeune, les retours étaient plus difficiles. Je ramenais vraiment la guerre avec moi ! J’étais mal à l’aise à Paris. J’étais mal à l’aise de voir les gens rire. Je ressentais un sentiment très particulier, probablement semblable à celui qu’ont pu ressentir les habitants d’un village vietnamien que j’ai traversé. Je me rappelle qu’un poste de tir américain était installé tout à proximité de ce village. Des dizaines de canons de 155 mm tiraient un obus toutes les minutes, 24 h/24. Pendant des années ! Après les Accords de Paris, les tirs ont cessé subitement. Les villageois ont alors été atteints d’un sentiment de malaise, parce que les tirs avaient cessé de rythmer leur vie. Les gens du village étaient véritablement angoissés. Je me souviens aussi d’un jeune Vietnamien qui n’avait jamais connu autre chose que la guerre. Il était totalement incapable d’imaginer ce que pouvait être la paix. Après avoir longtemps discuté avec lui pour tenter de le lui expliquer, il m’a simplement répondu cela : « D’accord, ça a l’air bien, à la seule condition que l’on me laisse mon fusil, comme ça, si je vois un communiste, je le tue ! ». La guerre et la paix sont vraiment deux mondes séparés. Aussi, lorsque l’on quitte l’un pour revenir à l’autre, un temps de réadaptation est absolument nécessaire, surtout lorsqu’on est jeune comme je l’étais à l’époque.

Le Magazine.info : Inversement, n’avez-vous pas parfois le sentiment que lorsque l’on vit dans un pays en paix, il est presque impossible d’appréhender la réalité de la guerre, malgré ce qu’en rapportent en permanence les journaux télévisés ?

Patrick Chauvel : C’est certain que les journaux télévisés ne sont pas le meilleur support pour rendre compte de ce qu’est vraiment la guerre. Les reportages y sont beaucoup trop courts. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je suis passé au documentaire. En 52 minutes, au moins, il est vraiment possible de faire comprendre ce qu’est par exemple l’horreur d’un attentat suicide en plein Jérusalem. Il faut cependant faire attention à ne pas choquer les personnes à qui l’on s’adresse. Cela ne sert à rien, c’est contreproductif. Il faut interpeller, mais il ne faut pas choquer ! Par exemple, le dernier attentat suicide dont j’ai été témoin a tué 7 enfants. Aucun d’entre eux n’était âgé de plus de trois ans. Ils étaient tous totalement démembrés après l’explosion. Et dans le bus dans lequel se trouvait le kamikaze, il y avait également 21 morts en charpie. J’ai filmé tout ça parce que j’étais là. Mais je ne crois pas qu’il fallait le montrer. Il suffisait de montrer le regard horrifiés des Israéliens qui se trouvaient là pour que l’on comprenne l’importance du drame auquel ils assistaient, l’intensité de leur souffrance et de l’état de choc dans lequel ils se trouvaient. L’important est avant tout de parvenir à provoquer une réflexion, et éventuellement une intervention, mais pas forcément de montrer la guerre dans sa réalité la plus crue.

Le Magazine.info : Vous avez dit récemment dans une interview : « les combattants perçoivent bien la fonction de la photo, ils en sont conscients. Du coup, on a l’impression de photographier des combattants publics, qui, désormais, distribuent eux-mêmes leurs photos ». Comment faire pour ne pas tomber dans ce piège ?

Patrick Chauvel : Effectivement, les choses ont changé en 35 ans. Auparavant, les combattants n’avaient aucune idée de l’image qu’ils véhiculaient. Ils ont pourtant très vite compris, surtout depuis l’arrivée des nouvelles technologies de l’information. Les journalistes doivent être conscients qu’aujourd’hui, dans certains pays, le combattant, mais aussi le civil, est parfaitement conscient de l’image qu’il peut donner de lui-même. Le journaliste doit donc trouver la bonne distance, afin de bien appréhender le conflit auquel il assiste.

Cela est particulièrement vrai dans le conflit israélo-palestinien, notamment depuis le début de la seconde Intifada. Les gamins qui jettent des pierres savent parfaitement que les caméras sont là. Les journalistes doivent donc faire très attention. Ils doivent savoir rester en retrait quand il le faut, pour que les gamins ne soient pas tentés de profiter de leur présence pour commencer les jets de pierres et lancer une émeute ; mais ils doivent aussi savoir se retirer lorsqu’il le faut, parce que parfois, les combats s’éternisent et dégénèrent justement à cause de leur présence. Les jeunes journalistes, en particulier, doivent apprendre à se méfier de cela. Ils ont tellement peur de rater quelque chose qu’il leur faut des images à tout prix. Pourtant, il vaut mieux rater une image que faire une image qui finalement aura surtout été mise en scène par les combattants. Il faut vraiment faire très attention à cela. D’autant qu’un journaliste ne travaille pas que pour l’immédiat, mais aussi pour la mémoire. Il faut faire des photos justes, car ce sont elles qui resteront dans les mémoires. Je pense par exemple à la photo de cette petite fille vietnamienne qui court toute nue sur une route après avoir été prise sous un bombardement au napalm. Tout le monde connaît cette photo, justement parce qu’elle n’a rien d’une mise en scène. C’est cela qui est formidable avec la photo, et avec l’image en général. Une fois prise, une photo peut devenir incontournable.

Le Magazine.info : Vous rentrez récemment d’un nouveau voyage en Israël. Pouvez-vous nous dire qu’elle est votre vision de la situation actuelle ?

Patrick Chauvel : Il est bien difficile d’avoir un avis, tant la situation est compliquée. Je dois dire néanmoins que je ne suis pas très optimiste, même si je pense qu’ils seront bien obligés un jour de faire la paix. Il suffit de parler aux gens de la rue, qu’ils soient israéliens ou palestiniens, pour comprendre qu’ils en ont assez. Ils sont pris dans un processus de violence, pourtant, si cela ne tenait qu’à eux, ils arrêteraient tout. Les Palestiniens ne rêvent que d’une chose : passer une soirée tranquille à Tel-Aviv, danser, boire un verre, même s’ils ne l’avouent que dans l’intimité. En public, ils tiendront toujours un discours patriotique et offensif. Et pour les Israéliens, c’est pareil ! Malheureusement, ce sont les extrémistes qui tirent les ficelles pour le moment. C’est la guerre qui justifie leur action. Ils ne tiennent donc pas vraiment à ce qu’elle s’arrête.

Le Magazine.info : Vous avez récemment réalisé un film, « Kamikaze 47, l’histoire de Wafa Idriss », qui raconte l’histoire de cette jeune femme de 28 ans qui deviendra la première femme palestinienne à commettre un attentat suicide, le 27 octobre 2002, en se faisant sauter en plein Jérusalem, tuant ainsi un Israélien de 81 ans et blessant une centaine de passants. Pouvez-vous nous raconter ici l’histoire de cette jeune femme ?

Patrick Chauvel : J’ai rencontré Wafa Indris bien avant sa mort, et à l’époque, je ne pouvais pas me douter qu’elle allait devenir la première femme kamikaze. Et je ne pense pas qu’elle non plus pouvait s’en douter. Je crois que le phénomène des kamikazes repose avant tout sur une incroyable frustration. Wafa Idriss était apparemment parvenue au bout de ses limites. Elle était dans un état dépressif. Elle venait de perdre un enfant juste avant sa naissance et on lui avait annoncé qu’elle ne pourrait plus en avoir. Elle était infirmière, elle voyait des morts tous les jours, des gamins de dix ans. Elle était véritablement à bout et ne savait plus quoi faire pour faire avancer la situation. C’est à ce moment-là qu’elle a sans doute été récupérée par des personnes chargées de repérer les kamikazes potentiels. Lorsque l’on est à bout de nerf, on est une proie facile, très ouverte à l’endoctrinement. Bien évidemment, les responsables de l’attentat kamikaze sont sans doute le Hamas ou les brigades d’Al-Aqsa. En revanche, qui peut être considéré comme responsable de l’état de dépression et de frustration dans lequel se trouve le futur kamikaze, si ce n’est les responsables israéliens actuels qui méprisent totalement la situation des Palestiniens ?
 
Tout ça est écoeurant et désastreux. Wafa n’aura finalement tué qu’elle et un homme de 81 ans. Je me suis renseigné sur cet homme. Il semble que c’était un type merveilleux. C’était un vieil Israélien, qui avait vécu la Seconde Guerre Mondiale. Il était cultivé, musicien. Je suis sûr que Wafa l’aurait adoré si elle l’avait rencontré. Elle avait perdu son père. Ça aurait pu être un grand-père génial. Vraiment, elle aurait sans doute adoré ce type. Pourtant, elle l’a tué. C’est ça le vrai drame, peu importe le côté où l’on se trouve. Après Wafa, la seconde femme kamikaze n’avait que 18 ans ! Elle était brillante. Elle parlait parfaitement anglais. Elle a tué des filles de son âge, qui faisaient les mêmes études qu’elle. Elles auraient sans doute pu être de très bonnes copines. Mais elle les a tuées !

Le Magazine.info : Vous êtes un homme de terrain, vous savez parfaitement ce qu’est la guerre. Au-delà du conflit Israélo-palestinien, que pensez-vous de la politique américaine au Moyen-Orient, et en particulier, de l’intervention en Irak ?

Patrick Chauvel : Les Américains ont totalement négligé d’apprendre à connaître le peuple Irakien, pour ne se focaliser que sur Saddam Hussein. L’Irak est pourtant l’héritier de l’une des plus belles et des plus vieilles civilisations du monde. Bien évidemment, il fallait virer Saddam. Mais il n’était pas nécessaire pour autant d’humilier les Irakiens. Il y avait peut-être d’autres moyens d’agir que d’arriver avec des chars et d’aplatir la moitié du pays. En éliminant Saddam, les Américains ont en même temps réussi l’exploit de liguer en partie contre eux le peuple qu’il prétendait délivrer. Je pense pour ma part qu’ils ne sont qu’au début de leurs problèmes. J’ai déjà eu l’occasion de rencontrer les Feydahins irakiens. Je peux vous assurer qu’ils ne reculeront devant rien. Ce qui se passe en ce moment, ce n’est rien par rapport à ce qu’il peut encore arriver. Pour le moment, les Feydahins ne font que tester les Américains. Ils les jaugent. De plus, les Irakiens savent très bien que les élections présidentielles américaines sont sur le point d’arriver. A mon avis, ça risque d’être très chaud en Irak pendant la campagne américaine. La campagne électorale va en partie se jouer en Irak et je pense que sur ce point, Bush a vraiment des soucis à se faire.


Patrick Chauvel, Rapporteur de Guerre, Oh Edition, 2003, 295 p. - 19,90 €.


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Le 1er décembre 2004

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