Le timide retour de la cocaïne

Découverte en 1859, la cocaïne a toujours été considérée comme une drogue de luxe. Son prix et son offre restreinte font encore obstacle à sa popularisation. Mais depuis 1995, on observe en France une hausse sensible de sa consommation, notamment dans les grandes villes. Le profil de l’usager se diversifie. La poudre blanche ne semble plus destinée aux seules classes aisées. Serait-elle en voie de démocratisation ? Les statistiques ne paraissent pas le certifier, mais les spécialistes restent vigilants.

Drogue puissante et dangereusement addictive, la cocaïne peut provoquer de graves dysfonctionnements psychiques (dépression, paranoïa, psychose, etc.). Paradoxalement elle jouit d’une image positive auprès de nombreuses personnes.

L’attrayante cocaïne

Depuis la Belle Epoque, la cocaïne a généralement été perçue comme la drogue des créateurs. A l’inverse de son dérivé le crack, ou de l’héroïne, elle n’a jamais symbolisé une forme de marginalité morbide. On associe souvent les milieux artistiques et mondains à son usage. Les récents aveux de Johnny Hallyday ou de Pierre Palmade sur leur cocaïnomanie, la révélation d’un important trafic au sein du show-business parisien en mars 2005, mêlant des personnalités connues du petit et du grand écran (Thierry Ardisson, Béatrice Dalle) n’ont fait que renforcer cette représentation. Ces liaisons divulguées dans les médias, entre célébrités et cocaïne, confortent l’idée que ce stupéfiant est a priori inoffensif et même attrayant, puisqu’il n’exclu pas la réussite professionnelle de personnalités renommées.

Une consommation en hausse : nouvelles tendances

Néanmoins, la cocaïne n’est plus une pratique exclusive des milieux aisés et de la jet-set parisienne. De nouvelles tendances sont apparues, et les individus marginalisés ou à faible revenus font désormais partie des utilisateurs. Il est de plus en plus fréquent dans les milieux étudiants de consommer une ligne au détour d’une soirée. De même, dans les festivals techno ou les raves-parties, la cocaïne se joint à la fête en compagnie du cannabis ou des ecstasys.

Cette timide démocratisation peut s’expliquer de plusieurs manières. Dans un premier temps, le prix du gramme de cocaïne a significativement diminué. Il se négocie aujourd’hui entre 60 et 75 euros contre une centaine d’euros il y a vingt ans. Ensuite l’accessibilité au produit est devenue plus facile. L’offre de cocaïne s’est accrue. La saturation du marché américain a poussé les producteurs colombiens, péruviens ou brésiliens à exporter leurs marchandises vers l’Europe, marché plus lointain, mais porteur. Les saisies douanières dans l’espace européen en témoignent, elles sont en constante progression. Ces facilités d’approvisionnement ont contribué à ce que la cocaïne fasse un retour remarqué.

Un phénomène encore marginal

Malgré sa déflation, la cocaïne n’est pas encore à la portée de toutes les bourses. Son coût lui interdit pour l’instant de connaître une diffusion plus large au sein de la société, surtout auprès des plus jeunes. Seulement 2 % des adultes français, âgés de 18 à 44 ans, ont déclaré l’avoir déjà consommée au moins une fois dans leur vie, et 3,3 % des garçons de 19 ans l’ont déjà expérimentée. Les spécialistes restent malgré tout vigilants, car la cocaïne conserve un réel potentiel de croissance au sein d’un marché français, qui contrairement à d’autres pays européens, est encore peu familiarisé avec ce stupéfiant. Et son pouvoir de séduction reste important pour les individus les plus fragiles. Il est peu probable à moyen terme que la poudre blanche devienne aussi populaire que le joint, mais elle pourrait s’enraciner durablement dans les habitudes de certains groupes sociaux.



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Le 29 décembre 2005

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